Un jeu oulipien consiste à réécrire El Desdichado de Gérard de Nerval à l’aide d’une ou de plusieurs contraintes (ce site de Nicolas Graner recense cette aventure poétique).
Voici une disvenente : réécriture du poème en n’utilisant que des mots sans E (lipogramme en E) ou des mots n’utilisant que la voyelle E (monovocalisme en E) :
Par exemple,
Mon front est rouge encor du baiser de la reine ;
devient
Mon front est zinzolin du bisou de ma femme ;
El Disvichado
Je suis l’enténébré, — le vif, — l’être abattu
Fils d’un roi aquitain à la tour ébréchée :
Ma star est décédée, — et mon luth inconnu
Mêle à mes rêves noirs des sons désespérés.
Dans la nuit des koubbas, toi qui m’as repêché,
Rends-moi la mer d’Olbia et les Champs Phlégréens,
Le sénevé des champs qui me piquait le nez,
Et le truc où la gesse est mêlée aux raisins.
Suis-je Amour ou Putto ? … Lusignan ou Biron ?
Mon front est zinzolin du bisou de ma femme ;
J’ai rêvé du tocsin jouant dans un ashram …
Et j’ai trois fois, gagnant, parcouru l’Aliakmon :
Modulant tour à tour au plectre de Céphée
Les soupirs de la mère et les cris de la fée.
Gerbert de Narval
Notes :
Rends-moi la Pausilippe et la mer d’Italie
devient
Rends-moi la mer d’Olbia et les champs Phlégréens
(ce qui, géographiquement, se tient)
La fleur qui plaisait tant à mon coeur désolé
devient
Le senevé des champs qui me piquait le nez
(le senevé est sorte de moutarde sauvage)
J’ai rêvé dans la grotte où nage la sirène …
devient
J’ai rêvé du tocsin jouant dans un ashram …
(jeu de mot entre « sirène » et « tocsin »)